Bonne arrivée

Les jours qui précédent mon départ au Togo sont lourds en émotion : instants de surexcitation alternent avec des moments de profonde tristesse. C’est donc rapidement que je quitte ma famille à Charles de Gaulle.
Dans l’avion, deux Togolais sentent le whisky. Ils transportent une plaque qu’ils mettront sur la tombe de leur père récemment décédé. En Libye je suis pressée de faire la seconde moitié du chemin. A Lomé, mon impatience s’accentue, face à l’attente des démarches administratives et celle relative aux bagages. Kafui, Rachidi et Dodzi m’attendent. Les retrouvailles sont irréelles. « C’est comme une rêve ».
La Ford rouge décapotable empruntée à Nukunu nous emporte en chansons, assis sur la capote tels des teenagers, jusqu’à la cantine de l’aéroport où nous buvons une Awooyo et du Sodabi, puis vers l’hôtel réservé pour l’occasion.
Dimanche, je jette mon bracelet israélien provenant du mur des lamentations dans l’océan et nous prenons la route vers Kpalimé. Nous nous arrêtons chez Franck et Bella qui nous offrent un verre d’Alombo dans la bonne humeur des retrouvailles. Sur le chemin vers la maison, tous les amis nous accostent, les arrêts et poignées de main sont nombreux.
Nous partons au village Yoh où des animations ont lieu. C’est l’occasion de saluer beaucoup d’amis, membres de familles et personnes côtoyées en janvier dernier, qui me souhaitent « bonne arrivée ». Nous mangeons une salade à la Cafete et allons chez Franck où je retrouve Codjo et Pascal.

Lundi, nous rapportons la voiture à Nukunu et achetons un kit Moov à Tcheki, le président du groupe Katamasu. J’apprends que des «entraînements» ont lieu régulièrement en vue d’un festival au Ghana en juin et qu’il serait «bon» que je participe aux répétitions, pour échanger des idées sur la danse. On a donc parlé de moi et tous m’estiment.
Nous achetons une poule et ses oeufs dans la rue et l’apportons à Irène pour qu’elle la rôtisse au dîner. Nous la mangeons avec « la pâte fermentée », enveloppée dans une feuille de bananier. La conversation porte sur le tabac et les personnes qui mangent des chiens, chats et serpents. Gaff, le benjamin, qui souhaite m’apprendre à parler éwé, conduire une moto et piler le foufou, m’explique que je ne dois pas ranger et faire la vaisselle, qu’on « lave cela le matin. Au cas où on meurt dans la nuit, les gens pourront savoir ce qui a provoqué cela, en testant la nourriture sur un animal ».

Mardi soir, nous empruntons la moto de Julien pour nous rendre à Tomegbe, où a lieu une veillée. La route est tout aussi surprenante que la veillée elle-même. Plus nous avançons vers la montagne, plus le climat se rafraîchit. Le vent frappe, les arbres se resserrent sur nous, la forêt nous emporte. Je me sens comme Alice au pays de Carroll. Les lumières de Kpalimé qui s’éloigne nous éclairent et les étoiles s’y confondent. A Tomegbe, les femmes et les hommes chantent et dansent séparément, certains marchent avec des lampes, d’autres miaulent. Le défunt, mort en France sous un train, est enfermé dans un cercueil français et ne pourra être vu comme prévu. Si les Togolais ne craignaient pas de trouver un corps plein de sang, ils seraient passer voir le défunt à tour de rôle.

Nous nous levons à 5h le lendemain pour acheter une moto à Lomé, essentielle pour découvrir les autres régions du Togo.
J’ai d’ailleurs trouvé le Petit Futé ici et choisi mes escales. La voiture vers Lomé roule à 110km/h sur une route pleine de trous, qui serait limitée à 70 en France. Quatre à l’arrière trois à l’avant, ça monte ça descend. La personne du milieu se baisse à deux reprises, police oblige. Il se retrouve alors allongé, le buste dans le levier de vitesse, la tête entre nos jambes à l’arrière. Arrivés à la « station », nous prenons un « zem » pour passer au consulat déclarer ma présence au Togo puis nous rejoignons un ami qui nous aide à choisir une moto Sanya, à trouver un casque supplémentaire, le premier étant offert avec un « complet en raglan » (haut et bas en k-way) et quelques gadgets. Nous nous arrêtons au péage pour manger. Je refuse de goûter les brochettes d’escargots que vend Boby Star et dont tout le monde raffole. Au retour, une averse nous surprend, des réglages sont opérés par un mécanicien « sur le bord de la route ». Je suis fatiguée et gelée.
Arrivés à Kpalimé, nous apprenons que la femme d’Israël a accouché. Nous partons à la superbe répétition de Katamasu, 25F le cours. J’ai très envie de danser. Je ne vois pas trop ce que je pourrai apporter mais j’ai très envie d’apprendre.

Je participe à la répétition du jeudi. L’échauffement est épuisant mais j’arrive à apprendre quelques pas d’une des chorégraphies du groupe. A la maison, nous partageons un ananas et une belle conversation à propos des mois qui viennent de s’écouler. Même si c’est émouvant de parler de la France, je me sens bien et pense vivre une belle aventure ici, entourée de gens qui me veulent du bien.

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